Canada. Privy Council. Treasury Board : Le Conseil du Trésor a toujours constitué, depuis sa création en 1867, en vertu de la Loi, un comité du Conseil privé doté de pouvoirs délégués à l'intérieur d'une sphère définie qui se limitait à l'origine aux questions financières mais a rapidement fini par inclure la coordination des pratiques et de la politique concernant le personnel, les finances et l'administration générale. Au sens strict, le Conseil du Trésor est un comité formé de cinq ou six ministres du Cabinet qui peuvent, dans le cadre des pouvoirs qui leur sont délégués, prendre des décisions en vertu de la loi au lieu d'un décret en conseil ou recommander des propositions officielles au Cabinet en vue de son approbation par décret en conseil. Peu après sa création, le Conseil s'est doté d'un poste de secrétaire qui est graduellement devenu un petit secrétariat, puis un ministère (ou plusieurs) chargé d'exercer le pouvoir législatif du Conseil dans la gestion des ressources gouvernementales. Cette évolution administrative a transformé le Conseil du Trésor en un comité permanent du Cabinet au terme de la Loi et en a fait pratiquement le seul secrétariat de toute l'organisation du gouvernement du Canada capable de s'adapter rapidement aux nouveaux rôles et aux nouvelles responsabilités de coordination de l'administration en général et de gestion des ressources au sein de l'appareil gouvernemental (au moins depuis 1931).
Constitué en tant que " Board of Treasury " (en anglais) par décret en conseil (C.P. 1867-3, 2 juillet 1867) et renommé " Treasury Board " en vertu de la Loi en 1869 (32-33 Vic., chap. 4, art. 4), le Conseil était responsable, à ses débuts, de toutes les questions touchant les finances, le revenu, les dépenses et les comptes publics que lui confiait le Conseil privé ou qu'il jugeait nécessaire de soumettre au Conseil privé. Le Conseil du Trésor a d'abord eu une fonction de bureau central pour tous les problèmes d'administration financière. La gestion financière a inévitablement amené le Conseil à s'occuper des questions de rémunération, de nomination et de gestion du personnel en général. En 1896, le Cabinet a indiqué officiellement que toutes les recommandations (...) relatives aux nominations, à l'emploi ou à la continuité d'emploi, aux promotions, aux augmentations ou réductions de salaire ou de la paie, à l'autorisation ou à la prolongation de congé autorisé, aux paiements des frais de déplacement ou de déménagement de tout employé, ou employé proposé du gouvernement, permanent ou temporaire, devaient être soumises au Conseil du Trésor afin qu'il les examine avant leur présentation au Conseil privé (C.P. 8/3164, 14 septembre 1896). Dès 1897, le Conseil du Trésor a examiné l'ensemble de la politique administrative concernant la conservation des documents.
Jusqu'en 1914, les deux principales fonctions du Conseil du Trésor, en tant que comité du Cabinet, ont consisté à scruter les questions courantes ou mineures qui, en vertu de la Constitution, nécessitaient l'approbation du Cabinet, afin de faciliter leur examen par l'ensemble du Cabinet et à régler les nombreuses questions qu'il n'avait pas à présenter au Cabinet conformément aux pouvoirs qui lui étaient délégués en vertu de la loi et des ententes convenues au fil des ans. En 1888, par exemple, on a reconnu l'autonomie croissante du Conseil lorsque, pour la première fois, on a substitué la référence au pouvoir du Conseil (de déterminer le moment et la façon de rémunérer les fonctionnaires) à celle du gouverneur en conseil dans une loi (51 Vic. chap. 7 art. 3). En 1896, il était pratique bien établie que le Conseil du Trésor publie ses nombreuses délibérations sans référence au Conseil privé dans le cadre de son mandat. Cette structure générale d'examen préliminaire et d'autorisation indépendante s'est maintenue jusqu'à l'époque moderne, même si le mandat du Conseil et les pouvoirs qui lui étaient délégués ont eu tendance à s'accroître et à devenir inclusifs en ce qui concerne toutes les questions relatives au personnel (sauf la dotation après 1918), à la gestion financière et à la politique administrative en général dans tout le gouvernement du Canada. Les questions soumises à un examen serré présentées par le Conseil à l'ensemble du Cabinet ont en général été approuvées d'office, l'examen par le Conseil (ou d'abord par son secrétariat) consistant en une étude en profondeur des cas, des directives ou de la politique en cours d'examen. De la réglementation concernant les cas spécifiques aux directives générales en passant par les délégations de pouvoir plus vastes selon des structures d'imputabilité complexes, le Conseil a joué en général, depuis 1931, le rôle d'agent de modification et de réforme des fonctions gouvernementales.
L'activité à laquelle on associe le plus souvent le Conseil du Trésor est la préparation du budget annuel des dépenses, un mécanisme qui, depuis le milieu des années 1960, a pris la forme d'un cycle pluriannuel complexe de gestion des dépenses et d'imputabilité, par lequel le gouvernement du Canada tente de concilier les principes de la responsabilité ministérielle déléguée, l'imputabilité centrale, l'harmonisation des dépenses avec les priorités du Cabinet et le principe constitutionnel interdisant toute dépense de fonds publics sans l'autorisation du Parlement dans un but précis. Que ce soit en vertu de la structure organisationnelle et du mythe juridique d'un comité du Cabinet appuyé par un secrétariat ou comme ayant un très vaste mandat en matière de politique administrative et d'attribution des ressources, le Conseil du Trésor est devenu depuis 1931 un mécanisme souple et efficace d'imputabilité et d'attribution des ressources conformément aux priorités du gouvernement en général élaborées par le Cabinet et adoptées par le Parlement.
Les procédures du Conseil ont pris graduellement un caractère plus officiel, mais soulignent en général le fait que le processus soit resté assez stable. Les présentations proviennent en grande partie des ministères, bien que certaines émanent parfois du Secrétariat du Conseil du Trésor et que le Cabinet peut présenter des demandes précises. De nos jours, les fonctionnaires du Secrétariat scrutent la plupart des présentations avant qu'elles soient soumises directement au Conseil et ils dotent chaque présentation d'une recommandation. Le Conseil note sa décision (dans ce qu'on appelle officiellement le compte-rendu des décisions). Si la décision doit être approuvée, la présentation devient alors une décision officielle du Conseil, qui a force de loi en vertu d'une loi en vigueur et d'une délégation de pouvoir du Cabinet ou constitue une recommandation officielle au Cabinet lorsqu'il n'y a pas de pouvoir législatif explicite ou de délégation de pouvoir du Cabinet au Conseil en rapport avec les questions en cours d'examen.
Même si les procédures et les activités du Conseil liées à la croissance du Secrétariat après 1931 sont devenues un élément important d'une gestion financière efficace au sein du gouvernement du Canada, le rôle du Conseil du Trésor avant 1931 était plus problématique. Responsable de prescrire la façon dont on devait tenir les comptes ministériels en 1878 (41 Vic., chap. 7), le Conseil du Trésor est devenu l'arbitre final des différends opposant le vérificateur général et les fonctionnaires ministériels quant aux paiements. En pratique, le Conseil a souvent affirmé son autorité de manière à empêcher le vérificateur général d'effectuer une prévérification indépendante efficace, conservant ainsi, jusqu'en 1930, une autonomie et une prérogative ministérielles souples mais manquant de rigueur. La responsabilité de concilier l'administration financière d'un régime ayant des canaux d'imputabilité et hiérarchiques imprécis a inévitablement amené le Conseil à se préoccuper des détails et à prendre des décisions répétitives quant aux cas spécifiques et aux conflits administratifs. Dans le rapport qu'il présentait en 1912 sur la fonction publique, Sir George Murray recommandait, comme possibilité, l'abolition du Conseil en invoquant le fait qu'il obligeait ses membres à consacrer trop de temps aux petits détails et que les pouvoirs qui lui étaient délégués étaient trop limités pour être efficaces. L'examen de 1912, toutefois, devait confirmer le mandat du Conseil du Trésor comme principale façon de réduire la charge de travail du Cabinet, en étudiant les présentations d'un point de vue purement administratif ou en traitant celles-ci de sa propre autorité (C.P. 2364, 24 septembre 1913). Certains critiques ont laissé entendre que par ce rôle se rapportant aux questions de personnel, le Conseil a assuré une façon commode de concilier les demandes incompatibles de nomination à des fins partisanes jusqu'à ce que la Commission du Service civil ait acquis suffisamment d'autonomie après 1918, année après laquelle le Conseil du Trésor est devenu un mécanisme qui a permis au Cabinet de régner sur les pouvoirs importants consentis à la Commission simplement en faisant en sorte que toutes les propositions relatives à l'organisation et à la rémunération des employés présentées en vertu de la Loi sur le Service civil ou autrement soient d'abord soumises au Conseil du Trésor pour qu'il fasse rapport au Conseil privé (C.P. 1925-194, 7 févr. 1925).
La composition officielle du Conseil du Trésor en tant que comité du Cabinet a peu changé avec le temps. Ses premiers membres, en 1867, comprenaient le ministre du Revenu de l'intérieur, le ministre des Douanes, le receveur général et le ministre des Finances nommé d'office président du Conseil. A partir de 1887, la composition du Conseil a cessé d'être liée à des postes spécifiques du Cabinet et le Conseil était composé des cinq ministres désignés par le gouverneur en conseil et du ministre des Finances nommé président d'office (50-51, Vic. chap. 13). Une fois le Secrétariat du Conseil du Trésor constitué en tant que ministère distinct, en 1966, le nouveau ministre responsable, le président du Conseil du Trésor, est devenu président désigné du Conseil, constitué de lui-même, du ministre des Finances, comme membre d'office, et de quatre autres membres du Cabinet (14-15-16 Elizabeth II, chap. 25, art. 32). J. M. Courtney, "Memo re Powers of Tresury Board", 10 février 1896, fonds du ministère des Finances, volume 3112, dossier 8514. Canada, Chambres des communes, documents parlementaires, 1913, numero 57a, p.9