Conseil national de recherches du Canada : Le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) a été créé par la Loi sur le Conseil national de recherches (7-8 George V, chap. 20, 1917), sous le nom de Conseil consultatif honoraire pour les recherches scientifiques et industrielles. C'est la première guerre mondiale qui a fait prendre conscience au gouvernement fédéral des lacunes du pays en ce qui concerne la recherche et le développement scientifique et technique. A sa création le Conseil met sur pied un programme de bourses, un programme de subventions à la recherche, et un système de comités consultatifs chargés de coordonner la recherche au Canada dans des domaines spécifiques. Il lui revient aussi de conseiller le Cabinet en matière de science et de technologie, et d'assurer la liaison avec les organisations scientifiques internationales. Par l'intermédiaire du ministre du Commerce, le Conseil répond alors au sous-comité du Conseil privé sur la recherche scientifique et industrielle.
En 1924 une refonte de la loi (14-15 George V, chap. 64) constitue le Conseil en corporation, qui contrôle ses dépenses et qui peut embaucher son propre personnel. Il acquiert un président à temps plein. Le mandat du Conseil est étendu à la détermination des unités de mesure au Canada. Il existe alors deux types de comités associés: ceux qui fournissent des avis, et ceux qui dirigent ou coordonnent des projets de recherche précis.
Le Conseil embauche son premier chercheur en 1925. En 1932 il inaugure à Ottawa ses nouveaux laboratoires, qu'on nomme parfois "National Research Laboratories". Le CNRC compte alors quatre divisions: physique et génie, chimie, information, et biologie et agriculture, auxquelles s'ajoute en 1936 la Division de génie mécanique. Les divisions de recherche, dont les directeurs jouissent d'une large autonomie, constitueront le principal mode d'organisation au CNRC jusqu'aux années 1990. Dès 1939 on commence l'aménagement de nouvelles installations de recherche, dans ce qui constitue encore la banlieue d'Ottawa. Durant ses premières décennies d'existence le CNRC se fait remarquer en participant, directement ou par ses subventions, à l'amélioration des conserves de homard, à celle du béton dans l'Ouest canadien, à la mise au point de variétés de blé résistantes à la rouille et de locomotives plus aérodynamiques. Pour pallier les difficultés qu'éprouvent les chercheurs canadiens à publier au pays, le Conseil lance en 1929 le Canadian Journal of Research, qui engendrera plusieurs revues plus spécialisées. En 1997 le CNRC publiait 14 revues scientifiques et techniques.
Durant la deuxième guerre mondiale, le Conseil porte l'essentiel de ses activités sur des recherches appuyant l'effort militaire, et devient de facto le centre de recherche de l'armée, de la marine et de l'aviation. Ses effectifs de recherche quadruplent, et son budget passe de un à douze millions de dollars. Ses chercheurs participent à la mise au point du radar, et se penchent notamment sur la détection des mines et des sous-marins, la balistique, les explosifs, la conservation et le transport de la nourriture, l'aéronautique et la fabrication du magnésium métallique. C'est sous la direction du CNRC qu'on établit en 1942 à Montréal un laboratoire de recherche en énergie nucléaire, en collaboration avec les gouvernements britannique et américain. A partir de 1944 le projet acquiert ses propres installations à Chalk River (Ontario). A sa création en 1946 la Commission de contrôle de l'énergie atomique assume en principe le contrôle administratif de ces activités, mais le CNRC en conserve la direction. D'ailleurs c'est C.J. Mackenzie qui préside à la fois le CNRC la Commission entre 1948 et 1952; par la suite, le président en exercice du CNRC siège toujours d'office à la Commission.
Les années qui suivent la guerre voient l'apogée de l'influence du CNRC. En 1945 il détient pratiquement le monopole des connaissances au Canada dans plusieurs secteurs-clés des sciences et des techniques. Les chercheurs du CNRC accumulent les réalisations dans plusieurs domaines, notamment les brise-lames, les simulateurs cardiaques, les horloges atomiques, la sécurité aérienne (détection des explosifs, balises de détresse), les coupes par jet d'eau, l'identification des toxines dans les mollusques, et le bras télémanipulateur de la navette spatiale américaine. En 1971 le Dr Gerhard Herzberg, directeur de la Division de physique, reçoit le prix Nobel de chimie pour ses travaux sur l'identification de molécules dans l'espace. La plus grande partie des recherches du CNRC porte néanmoins sur la recherche et le développement, le plus souvent en collaboration avec des entreprises. Le CNRC abrite aussi des installations uniques (souffleries, bassins, bancs d'essai) qui lui permettent d'effectuer des tests et des essais pour ses partenaires. En plus de répondre à des milliers de demandes de renseignements provenant d'entreprises à chaque année, le Conseil entreprend en 1962 un programme de subventions aux entreprises (Programme d'aide à la recherche industrielle).
Dès les années 1940 les activités de recherche se décentralisent, et le CNRC ouvre graduellement des laboratoires dans toutes les régions du Canada. En outre, de nouvelles divisions s'ajoutent dans les domaines de l'énergie atomique, de la recherche médicale, de la construction (avec, notamment, la responsabilité du Code canadien du bâtiment), de la radiotechnique et de l'électrotechnique, de l'aéronautique, de l'espace, de l'informatique et des mathématiques appliquées. En 1970 le CNRC absorbe le programme d'astronomie du ministère de l'Énergie, des Mines et des Ressources. La Société canadienne des brevets et d'exploitation limitée est mise sur pied en 1947 comme filiale à part entière du CNRC pour gérer les brevets obtenus par les chercheurs du Conseil. La même année le Service d'information technique, mis sur pied pour fournir des renseignements techniques aux entreprises, est transféré du ministère de la Reconstruction et des Approvisionnements au CNRC. Le rôle primordial du CNRC dans le domaine de l'information scientifique et technique est confirmé par la reconnaissance officielle de la Bibliothèque scientifique nationale en 1966.
En même temps, le Conseil favorise l'éclosion d'autres centres à partir de sa propre expertise. La recherche militaire passe au Conseil de recherches pour la défense, fondé en 1947. Énergie atomique du Canada Limitée, mise sur pied en 1952, prend en charge les laboratoires de Chalk River. La recherche spatiale passe à l'Agence spatiale canadienne en 1990. Le Conseil perd la plus grande partie de son rôle d'organisme subventionnaire au profit du Conseil de recherches médicales (1960) et du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (1978). La Société canadienne des brevets et d'exploitation limitée passe au ministère de l'Industrie et du Commerce en 1977. En 1992, à la faveur d'une réorganisation majeure, les divisions sont remplacées par des instituts de recherche, généralement d'envergure moindre, et définis par référence à des domaines d'application plutôt que par disciplines. En même temps, l'action du Conseil s'oriente de plus en plus vers l'aide aux entreprises et vers l'auto-financement de certaines de ses composantes.
La prééminence du CNRC s'érode donc à mesure que croît la recherche en science et technologie dans les universités et les entreprises. D'autres institutions fédérales, outre celles nommées plus haut, consacrent des ressources importantes à la recherche: Agriculture et Agroalimentaire Canada, le ministère de la Défense nationale, Ressources naturelles Canada, Environnement Canada, le ministère des Pêches et des Océans, et Industrie Canada. A partir des années 1960 le rôle du CNRC est explicitement remis en question à la faveur de l'intérêt renouvelé que manifeste le gouvernement fédéral pour la politique scientifique; la refonte de la loi en 1966 (14-15 Eliz. II, chap. 26) constitue un point tournant à cet égard. En 1963 la Commission royale sur l'organisation du gouvernement (commission Glassco) déplore le manque de supervision et de coordination des activités fédérales en matière de science et de technologie, reprochant notamment au CNRC d'avoir négligé son rôle de conseiller en matières scientifiques auprès du Cabinet, au profit de ses propres activités de recherche. Le rapport du Comité spécial du Sénat sur la politique scientifique (rapport Lamontagne), publié en 1970, accuse aussi le CNRC d'avoir privilégié la science fondamentale. Le gouvernement Pearson crée en 1964 au sein du Conseil Privé un Secrétariat des Sciences chargé d'étudier et d'analyser les activités fédérales en science et technologie. A partir de 1966, le Secrétariat assume aussi le rôle de conseiller du Cabinet qui était jusque là dévolu au CNRC. Le ministère d'État chargé de la Science et de la Technologie (MEST) lui succédera dans ce rôle à partir de 1971, alors que le Conseil des Sciences, fondé en 1966, assume un mandat plus large de consultation et d'éducation.
Le CNRC s'est successivement rapporté au Conseil Privé (1916-1971), puis au MEST (1971-1990), au ministère de l'Industrie, de la Science et de la Technologie (1990-1992), et au ministère de l'Industrie (1992-).
Au cours de son existence le CNRC a connu plusieurs présidents à temps plein: Henry Marshall Tory (1923-1935), Andrew G.L. McNaughton (1935-1939), Chalmers Jack Mackenzie (1939-1952), E.W.R. Steacie (1952-1962), B.G. Ballard (1962-1967), W.G. Schneider (1967-1980), Larkin Kerwin (1980-1989), Pierre Perron (1989-1994) et Arthur J. Carty (1994-).