Canada. Commission royale sur la Fonction publique (1907) : La Commission chargée d'enquêter et de faire rapport sur l'application de l'actuelle Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et de la législation connexe en vue de proposer les modifications qui s'imposent a été créé en vertu du décret du conseil C.P. 1108, 8 mai 1907, en vertu de la Partie 1 de la Loi sur les enquêtes (S.R.C., 1906, ch. 104) et sur la recommandation du ministre des Finances. La Commission était mandatée pour enquêter et faire rapport sur le fonctionnement de l'Acte du Service Civil et autres textes législatifs connexes, afin de proposer des changements pertinents pour accroître l'efficacité de l'administration publique. L'enquête devait se pencher sur les questions suivantes : 1) le fonctionnement général de l'Acte du Service Civil; 2) la classification de la Fonction publique; 3) les salaires; 4) les emplois temporaires; 5) les emplois techniques; 6) les promotions; 7) la discipline, les heures de service, etc.; 8) l'efficacité des divers personnels ministériels et l'aspect numérique des effectifs; 9) les pensions de retraite; et 10) tout autre sujet relatif à l'administration publique et qui, de l'avis des commissaires, demande à être pris en considération. Le service public, à Ottawa, sera tout d'abord l'objet de l'enquête. Mais les commissaires sont autorisés et ont reçu instructions d'étendre leur enquête à toute partie du service extérieur dont ils pourraient avoir connaissance, et qu'ils pourraient, étant donné le temps dont ils disposent, prendre en considération. A l'origine, les commissaires étaient les suivants: John Mortimer Courtney, président; Thomas Fyshe et John George Garneau. Garneau démissionna et fut remplacé par Philippe J. Bazin (Décret du conseil C.P. 1122, daté du 9 mai 1907). Le secrétaire était Thomas S. Howe.
La Confédération était à peine instituée qu'on réclamait l'abolition du favoritisme dans les nominations à la Fonction publique. Avant 1907, le gouvernement du Canada avait déjà mis sur pied trois enquêtes publiques sur la Fonction publique, en 1868, 1880 et 1891 respectivement, ainsi qu'un comité spécial de la Chambre des communes, en 1877. Toutes ces initiatives s'attaquaient plus ou moins à l'injustice générée par le favoritisme. Au cours des ans, de nombreux articles parurent contre ce mode de nomination à la Fonction publique et certains politiciens et hommes publics très en vue manifestèrent leur opposition à ce système. Plus ou moins influencés par la réforme de l'administration publique en Grande Bretagne, les réformateurs canadiens étaient généralement d'avis que la sélection et la promotion des fonctionnaires devaient se faire selon le mérite, par concours.
En 1907-1908, les témoignages recueillis par une autre commission royale sur la Fonction publique prouvaient hors de tout doute que le favoritisme était encore monnaie courante dans toute la Fonction publique et que la loi de 1882 (Acte concernant le Service Civil du Canada, 45 Vict., ch. 4) n'avait guère contribué à la réprimer. Les relations de parti constituaient une qualification toute aussi importante qu'auparavant et affectaient toujours les promotions, les salaires, les démissions, la discipline et l'achat de fournitures.
Le favoritisme revêtait le plus souvent la forme de nominations politiques fondées sur les services rendus au parti. Par ailleurs, selon une variante de la situation précédente, chaque changement de gouvernement était suivi de destitutions massives dans l'administration publique.
Le 2 mars 1907, John M. Courtney, qui allait être nommé président de la Commission royale de 1907-1908 sur la Fonction publique, prenait la parole au Canadian Club à Ottawa. Dans son allocution, il ne demandait pas seulement l'élimination du favoritisme dans la Fonction publique, mais aussi une meilleure rémunération des fonctionnaires, la réintroduction du régime de retraite, l'établissement d'une commission indépendante chargée de contrôler les nominations, l'implantation d'un système de nomination par concours et la soumission des candidats choisis à des périodes de probation.
Selon R.M. Dawson, spécialiste de cette question, la réforme de la Fonction publique s'imposait depuis bien longtemps. Selon lui, de 1882 à 1908, l'administration publique avait connu une période de stagnation et les quelques changements enregistrés ne s'étaient exercés que dans la mauvaise direction. Les examens d'entrée n'avaient guère connu de changement et, selon un rapport officiel, les candidats retenus étaient probablement moins compétents en 1908 qu'en 1882. Comme le montraient les rapports du Bureau des examinateurs, l'hostilité du ministre avait enlevé aux examens de promotion le peu de valeur qu'ils avaient. La réduction du nombre de ces examens, jointe au règlement autorisant un seul test pour deux ou trois promotions, avaient rendu cette partie de la loi de 1882 pratiquement inefficace et presque totalement inutile. Toujours selon R.M. Dawson, le Bureau des examinateurs a rigoureusement défendu les quelques privilèges qu'il avait et sa survie ne s'explique que parce que ses efforts n'avaient que peu d'effet. Le favoritisme demeurait donc florissant tout en se moquant purement et simplement de l'activité du bureau et en oubliant presque son existence.
Le 25 avril 1907, le ministre des Finances, W.S. Fielding, annonçait aux Communes l'intention du gouvernement du Canada de constituer une commission royale sur la Fonction publique. Il précisait que l'enquête concernerait essentiellement la Fonction publique intérieure (segment de l'administration publique situé à Ottawa). Détail significatif, il ne s'attendait pas à ce que le gouvernement apporte des changements très radicaux à l'Acte du Service Civil. Le 8 mai 1907, le décret autorisant la nomination de la commission royale réitérait que les principes généraux de l'Acte du Service Civil étaient considérés comme satisfaisants. Les témoignages recueillis par la commission prouvèrent le contraire et les commissaires recommandèrent l'abrogation de la loi (R.M. Dawson, The Civil Service of Canada, London, Oxford University Press, 1929, p. 19-89; J.E. Hodgetts, W. McCloskey, R. Whitaker et V.S. Wilson, The Biography of an Institution, the Civil Service Commission of Canada, 1908-1967, Montréal et London, McGill-Queens University Press, 1972, p. 3-43; The Canadian Annual Review, 1907, p. 424-425 et Chambre des communes, Débats, 25 avril 1907, p. 7793-7799).
Les audiences de la commission eurent lieu du 15 mai au 20 novembre 1907, à Ottawa, Québec, Montréal et Toronto. Collection de l'inventaire général de RG33-77.