Canada. Commission royale d'enquête sur les groupements de sociétés : La Commission royale d'enquête sur les groupements de sociétés a été créé en vertu du décret du conseil C.P. 879, 22 avril 1975 et décret en conseil C.P. 999, 1er mai 1975, en vertu de la Partie 1 de la Loi sur les enquêtes (S.R.C.., 1970, ch. 1-13) et sur la recommandation du premier ministre. La Commission était mandatée pour enquêter et de faire rapport sur (a) la nature et le rôle des principaux groupements de sociétés au Canada; (b) les incidences économiques et sociales de ces groupements sur l'intérêt public; et (c) l'existence de garanties ou leur nécessité éventuelle pour protéger l'intérêt public, eu égard à ces groupements. Les commissaires étaient Robert Broughton Bryce, président; Pierre A. Nadeau et Robert W.V. Dickerson. La maladie obligea Bryce à démissionner le 5 mai 1977. Le secrétaire était Serge Bourque.
La nomination, le 15 avril 1975, de la Commission royale d'enquête sur les groupements de sociétés fait suite à une tentative de Power Corporation of Canada Limited, importante société de portefeuille montréalaise, d'acquérir le contrôle d'une autre importante société industrielle d'investissement et de portefeuille, Argus Corporation limited de Toronto.
Le 25 mars 1975, Power Corporation annonçait son intention de faire une offre visant à contrôler toutes les actions ordinaires et de catégorie C (sans droit de vote) d'Argus Corporation. Bien que la proposition de Power soit demeurée sans effet, elle suscita beaucoup de discussions, particulièrement parmi les hommes d'affaires et les politiciens canadiens. Si Power avait réussi à absorber Argus, le contrôle d'intérêts importants dans le transport, les pâtes et papiers, les établissements financiers, les journaux, la radiodiffusion, l'emballage, l'alimentation de détail, la fabrication d'équipement et les mines, aurait été concentré dans les mains d'une seule société.
Dans leur rapport, les commissaires qui menèrent l'enquête sur les groupements de sociétés se livraient à des spéculations sur les caractéristiques financières de la société qui aurait résulté de la fusion Power-Argus. Ils prévoyaient, qu'une fois l'acquisition complètement réglée et avant tout engagement de valeurs actives, la valeur de la nouvelle société fusionnée aurait été (selon le bilan financier) de 783 millions de dollars. Cette société se serait ainsi trouvée au 37e rang (en terme d'actifs) de la liste de 1975 des grandes sociétés non financières. D'après ses gains, elle se serait classée au 24e rang, et ces calculs n'incluaient pas les actifs administrés par les sociétés financières du groupe Power.
A l'époque, le gouvernement fédéral ne pouvait pas réellement savoir si les lois sur les fusions alors en vigueur auraient protégé adéquatement les intérêts du public advenant la fusion Power-Argus. Le premier ministre Trudeau en arriva donc à la conclusion que le gouvernement avait besoin d'un supplément d'informations pour pouvoir évaluer les implications d'une fusion, parce que, affirmait-il, il n'existait aucun moyen économique d'arrêter une telle absorption et, pis encore, on ne savait pas si une telle fusion respectait ou non les intérêts du public.
Il est important de noter qu'à la différence des lois antitrusts américaines, la loi canadienne contre les coalitions ne se préoccupe que de l'entrave à la concurrence et non de la concentration du pouvoir économique.
Bien que le mandat de l'enquête sur les groupements de sociétés n'ait parlé ni de "conglomérats", ni de la tentative d'absorption d'Argus par Power, la commission était chargée de fournir au gouvernement du Canada des directives pour l'aider à formuler des mesures d'intérêt public sur les fusions de sociétés au Canada. (Voir: Rapport de la Commission royale d'enquête sur les groupements de sociétés, Ottawa, Approvisionnements et Services Canada, 1978, p. 167-180; et George Radwanki, "The Royal Commission on Corporate Concentration : A Political Perspective", Perceptives on the Royal Commission on Corporate Concentration, ed. Paul K. Gorecki et W.T. Stanbury, Scarborough, Butterworth and Co., Canada, Ltd, pour l'Institute for Research on Public Policy (Institut de recherches politiques), 1979, p. 67-75).
La commission tint ses audiences du 3 novembre 1975 au 13 septembre 1976 dans toutes les capitales provinciales du Canada, ainsi qu'à Sherbrooke, Chicoutimi, Montréal, Trois-Rivières, Ottawa, Sudbury, London, Windsor, Thunder Bay, Calgary, Vancouver, Prince George et Yellowknife. Elle reçut plus de 200 mémoires. Collection de l'inventaire général de RG33-113.