Lettre d'Étienne de Silhouette (au duc de Choiseul) - a lu attentivement le mémoire qui "traite de la nature de la Louisiane et du Canada" et celui qui "suppose l'abandon de cette dernière colonie (et) propose la transmigration des Canadiens à la Louisiane"; a fait un premier mémoire expliquant s'il convient ou non d'abandonner le Canada et joint à ce mémoire celui préparé par La Galissonière en 1751; a rédigé un second mémoire concernant le projet de transmigration des Canadiens à la Louisiane; "le débat est aujourd'hui entre la France et l'Angleterre pour la prépondérance en Amérique (et) les Anglais suivent leur objet avec une attention, une activité, des efforts et une dépense qui prouvent" qu'à leurs yeux le "système de l'Amérique" l'emporte "sur celui de l'Europe"; "la conquête du Canada n'est considérée par les Anglais que comme un acheminement à la conquête des autres colonies françaises" (La Galissonière partageait cette opinion); a entretenu plusieurs fois le maréchal de Noailles et le comte de Maurepas des projets de l'Angleterre et a, à leur demande, dressé un mémoire sur les finances, la Marine et le commerce: y montre "les vues des Anglais sur l'Amérique", insiste sur la nécessité de mettre le Canada en état de n'avoir rien à craindre de leurs entreprises et propose à cet effet d'y faire passer "les soldats...réformés à la paix" et de leur donner des congés, des terres et des facilités pour les cultiver; Noailles et Maurepas lui ont demandé de remettre ce mémoire à tous les ministres, ce qu'il a fait; ne peut s'empêcher "de soupçonner que la difficulté de soutenir le Canada ne soit la vraie source de tous les motifs par lesquels on cherche à colorer son abandon"; "s'il en est ainsi, on pourrait voir renaître dans peu le système gothique que la France peut se passer de colonies et qu'elle n'a besoin que de laboureurs et de soldats"; "la Russie ne manque point de soldats, elle ne manque point de laboureurs puisqu'elle envoie des blés en dehors, la Russie cependant reçoit des subsides des puissances étrangères, tant il est vrai que quelque chose de plus est nécessaire pour la dignité, la grandeur et la puissance d'un État..."; "on ne doit négliger aucun moyen pour mettre le Canada en état de se défendre contre les progrès ultérieurs des Anglais" (bravoure des Canadiens); si on perd cette colonie, il faut s'occuper "d'en obtenir la restitution à la paix ainsi que de celles des autres colonies françaises" dont l'Angleterre se sera emparée; "les Anglais mettront un si grand prix...à leurs conquêtes en Amérique qu'on ne pourra les déterminer à y renoncer qu'en leur faisant craindre les suites d'une invasion en Angleterre même" (projet d'une descente).