Mémoire de Talon au roi sur le Canada - la paix règne dans la colonie: tranquillité des Anglais et des Iroquois; les Anglais disent vouloir "établir quelque correspondance " avec les Français; querelle entre Marson et Grandfontaine; Talon explique ce qu'il a l'intention de faire lors de son voyage en Acadie: tâchera de réconcilier les deux officiers, accordera des concessions aux soldats, dressera le recensement de la colonie, verra s'il faut effectuer des réparations à Pentagouet et Port-Royal, laissera quelques règlements de police, placera quelque officier de justice et un ou deux récollets, vérifiera les mines, examinera les pêches, espère avoir quelque conversation avec le colonel Temple (ses promesses), projet de moulins à scie; a envoyé un petit vaisseau visiter toute la côte d'Acadie et porter des vêtements et des chaussures aux habitants; a envoyé Saint-Lusson et La Noraye "continuer l'ouverture du chemin d'ici à Pentagouet et au Port-Royal" et dresser de nouveaux mémoires; La Salle n'est pas encore de retour de son voyage du côté du sud; prise de possession d'un immense territoire dans l'Ouest par Saint-Lusson: du lieu où cet explorateur s'est rendu on ne croit pas qu'il y ait plus de 300 lieues jusqu'à la mer Vermeille ou du Sud; Saint-Simon et le père Albanel sont partis vers la baie d'Hudson: ils doivent "lier commerce de pelleteries" avec les Indiens et voir s'il convient d'y établir un entrepôt qui permettrait peut-être un jour de découvrir la communication des deux mers du Nord et du Sud; leur a donné ordre de prendre possession réitérée de cette région au nom du roi; deux vaisseaux anglais et trois barques auraient hiverné et commercé dans le voisinage de cette baie; on lui propose d'y expédier une barque "avec laquelle on prétend découvrir quelque chose de la communication de deux mers"; ne peut promettre le succès "de la recherche qu'on fait des mines", mais demeure assez convaincu qu'il y en a de cuivre, de fer et de plomb; mentionne les recherches entreprises et les résultats obtenus jusqu'ici: plomb du lac Champlain, cuivre du lac Supérieur et de la rivière Nantaouagan, mines de fer de Trois-Rivières, charbon de terre et mine de fer du Cap-Breton (nouvelles reçues du capitaine Poulet), cuivre de l'Acadie (Minville); a fait préparer du minerai de fer pour La Potardière; il y aurait des chênes en grand nombre au Cap-Breton; fabrication de goudron de bonne qualité (en envoie en France); rend compte des travaux du maître entrepreneur "qui trouve de la disposition à faire du brai et de la résine" et qui va enseigner ses méthodes de fabrication aux habitants et aux soldats; culture du chanvre: espère que dans trois ans les habitations fabriqueront les toiles nécessaires à leur usage et qu'avant six ans on aura de quoi fournir aux cordages des vaisseaux et du surabondant pour la France; fait moissonner de l'ortie et invitera les habitants à en recueillir; le tabac se cultive et mûrit comme ailleurs; a fait faire de la laine, du droguet, du bouraguan, de l'étamine et de la serge; "on travaille des cuirs du pays près du tiers de la chaussure"; "j'ai des productions du Canada de quoi me vêtir du pied à la tête"; espère qu'en peu de temps la colonie ne tirera de France "que très peu de chose du nécessaire à son usage"; la brasserie est achevée: peut fournir 2,000 barriques de bière aux Antilles et autant au Canada, pourra consommer plus de 12,000 minots de grains par année, fait cultiver 6,000 perches de houblon dans la terre des Islets; on a reçu jusqu'ici suffisamment de bestiaux, vu qu'on peut se procurer des "chevaux anglais" et des brebis en Acadie; multiplication des vaches et des porcs: on a du lard en quantité et on pourra bientôt fournir les Antilles "en chair salée"; il y a eu 6 à 700 naissances cette année et on prévoit une forte hausse de la natalité pour les prochaines années; ne pas envoyer de filles l'an prochain; a reçu quinze demoiselles pour marier des officiers et certains des principaux habitants; propose d'introduire une monnaie particulière pour la colonie (manque d'argent pour le commerce ordinaire); les jeunes Canadiens "se jettent dans les écoles pour les sciences, dans les arts, les métiers et surtout de matelots ou d'ouvriers"; oeuvre accomplie par Boutet de Saint-Martin qui instruit la jeunesse; concessions accordées à Denys et Bissot pour des pêches sédentaires (morue, loup-marin); construction d'un vaisseau de 400 tonneaux (agrès demandés); son atelier de marine: besoin de charpentiers, y emploie des charpentiers de maison, des jeunes gens et des soldats y apprennent un métier; on a terminé un bâtiment de 60 tonneaux prêt à partir pour les Antilles et un autre le sera bientôt; plusieurs bois de ce pays paraissent propres à la construction des vaisseaux (merisiers, ormes, frênes, érables, etc); pense sincèrement que cette colonie "deviendra quelque chose de grand"; les prises de possession de vastes territoires serviront à resserrer les nations étrangères "dans de très étroites limites", à l'exception des Iroquois, les nations indiennes se détachent insensiblement des autres Européens et on peut presque se promettre de leur faire prendre les armes quand on le désirera.