Entrevue avec Bernard Assiniwi au sujet de La Saga des Béotuks. Il parle de son arrivée à Terre-Neuve où, après 25 milles de route, sur un rocher où il n'y avait ni arbre ni herbe et ni âme qui vive, apparut brusquement une forêt où se trouvaient des marécages infestés de moustiques….c'est pour se protéger de cet inconvénient que les Indiens de l'île, les Béotuks, se couvraient la peau d'une terre d'un ocre rouge, d'où le nom de Peaux-Rouges dont les Blancs ont affublé les Indiens dès le premier contact. Un Maloin, venu pour prendre possession du territoire, avait vu sa troupe décimée par les moustiques et, sans jamais en voir un seul, 37 de ses hommes tués et décapités par les Béotuks afin que Dieu ne les reconnaisse pas si jamais ils allaient au paradis…Lorsque les Vikings ont débarqué avec leur chef Erik le Rouge sur l'île où l'on a renconstitué leur campement, c'était-croit-on - au cours d'une période où la température était assez chaude l'hiver pour que l'herbe ne disparaisse sous la neige. Les Béotuks avaient l'habitude d'adopter tous ceux qui débarquaient sur l'île. Il s'agit de l'époque à laquelle, lorsqu'un capitaine de navire voulait punir un matelot de sa mauvaise conduite, on l'abandonnait sur une île déserte.On a dit que les Béotuks étaient beaucoup plus grands que les autres peuples connus en ce temps-là : les Anglais les décrivent comme étant presque des géants. Et ils n'avaient pas les cheveux noirs jais des autres tribus mais plutôt d'un brun foncé tirant sur le roux. Sur le continent nord-américain, les autochtones avaient comme philosophie d'être les enfants de la terre, et ont accepté tous les autres humains comme tels. Il leur en a coûté ! Au Canada, les Indiens vivent maintenant sur des parcelles de terre : 2241 réserves, et l'on suggère d'abolir le système des réserves…il faudrait alors abolir tous les autochtones puisque c'est tout ce qu'on leur a laissé !Bernard Assiniwi explique qu'on a retrouvé les antécédents indiens de sa mère cinq générations plus tôt chez les Iroquoyens, à Kanawake, près de Montréal. Son père étant de pur sang indien, cela fait de lui un peu plus qu'un demi-autochtone. Il dit cependant se sentir entièrement autochtone, mais que les blancs et les autochtones refusent à le considérer comme un des leurs, ce qui complique un tant soit peu sa situation.Il dit ensuite que les Indiens étaient rabroués par les missionnaires venus au Canada pour les convertir. Ceux-ci se scandalisaient de ce que les Indiens avaient plusieurs femmes, ce qui s'explique pourtant du fait que les hommes étant toujours exposés aux dangers de la guerre entre les tribus et à ceux que comportait leur vie de nomades, il en restait bien peu pour épouser toutes ces femmes et veiller à leur bien-être. Une chose est sure : c'est que l'indien qui épousait plusieurs femmes les choisissait d'abord au sein de la même famille afin qu'elles soient habituées à vivre ensemble et qu'il y ait le moins possible de jalousie entre elles…Chez les Indiens, l'histoire orale est très importante et très exacte : elle remplace les livres et doit tenir compte de tout. Une jeune fille était un jour disparue et on ne savait pas où elle pouvait être allée, mais quelqu'un s'est souvenu qu'elle aimait beaucoup les libellules, qu'elle était curieuse de les regarder attentivement, de les étudier et de les voir agir. On s'est alors demandé où se tenaient en général les libellules ? dans les marécages…or les marécages se trouvaient en tel et tel endroit et c'est ainsi qu'on découvrit la jeune fille, endormie sous un arbre au bord de la rivière où elle contemplait le vol des libellules. Un talent reconnu doit être mis au service de la communauté.En tant que scientifique, Bernard Assiniwi a fait une étude au Musée canadien des Civilisations, sur quatre générations de mémoires vivantes modernes. Pourtant, il existe maintenant des écrits, mais les personnes qui ne savent ni lire ni écrire continuent cette tradition des mémoires vivantes ; et, au soupir près, au point et à la virgule près, le conte est toujours le même et raconté exactement de la même façon. Lorsqu'on y regard de près, on se rend compte que nous sommes tous des humaines et on moins de préjugés au sujet de nos congénères. Bernard Assiniwi ajoute qu'il vit la suite d'à peu près 500 des préjugés concernant les autochtones…c'est-à-dire que nous sommes d'abord des humains, et tous mes écrits tournent autour de cela. Mes écrits s'attachent à nos connaissances, ces connaissances qu'on doit conserver. Je ne dis pas qu'il faille retourner en arrière car conserver les connaissances du passé, c'est ne pas avoir à revivre les mêmes expériences et tenter de comprendre ce qu'est devenue la vie par rapport à ce qu'on a déjà vécu. <12mn>