Commission royale d'enquête sur les plaintes de citoyens canadiens d'origine japonaise résidant en Colombie-Britannique en 1941 selon lesquelles le Séquestre des biens ennemis se serait départi de leurs biens mobiliers et immobiliers en les vendant à des prix inférieurs à leur juste valeur marchande (Canada) : La Commission royale d'enquête sur les plaintes de citoyens canadiens d'origine japonaise résidant en Colombie-Britannique en 1941 selon lesquelles le Séquestre des biens ennemis se serait départi de leurs biens mobiliers et immobiliers en les vendant à des prix inférieurs à leur juste valeur marchande a été créé en vertu du décret du conseil C.P. 1810 du 18 juillet 1947, tel qu'amendé par les décrets du conseil C.P. 3737 du 17 septembre 1947, C.P. 242 et C.P. 243 du 22 janvier 1948 en vertu de la Partie I de la Loi sur les enquêtes (S.R.C., 1927, ch. 99) et sur recommandation du Secrétaire d'État. La Commission était mandatée pour enquêter sur les revendications formulées par des personnes d'origine japonaise résidant au Canada à la date de l'émission de ce décret, et des corporations dont la plupart des actions appartenaient à de telles personnes, soit : a) que les biens mobiliers et immobiliers confiés au Séquestre ont été vendus par le Séquestre à un prix inférieur à la juste valeur marchande desdits biens au moment de la transaction, en vertu de quoi les demandeurs ont subi des pertes; et b) que les biens mobiliers confiés au Séquestre ont été perdus, détruits ou volés alors que celui-ci, ou toute autre personne agissant en son nom, en détenait les droits ou devait en assurer la surveillance, en vertu de quoi les demandeurs ont subi des pertes d'une valeur égale à la juste valeur marchande de ces biens au moment de leur perte, de leur destruction ou de leur vol; attendu qu'aucune réclamation relative à la perte, la destruction ou le vol de biens ne sera étudiée si ces biens avaient été confiés au soin, à la surveillance ou à la gestion de toute personne autre que le Séquestre. Que le commissaire devra étudier chaque revendication et présenter un rapport au gouverneur en conseil faisant état, le cas échéant, des revendications qui, de l'avis du commissaire, sont légitimes, et du montant qu'il convient de verser au demandeur à titre de réparation de la négligence dont aura fait preuve le Séquestre. Le commissaire était Henry Irvine Bird. Étant donné le grand nombre de réclamations, M. Bird reçut l'aide de sept magistrats afin de mener cette enquête, lesquels étaient autorisés à entendre les dépositions à sa place (Décret du conseil C.P. 243 du 22 janvier 1948). Les secrétaires étaient A. Watson et Mlle V.J. White.
Après avoir déclaré la guerre au Japon le 8 décembre 1941, le gouvernement du Canada sentit se développer un certain malaise à l'égard de l'importante communauté japonaise de la Colombie- Britannique que l'on percevait comme une menace à la sécurité nationale. On confisqua tout d'abord les navires de pêche appartenant à des Japonais, puis on les vendit, et on incarcéra quelques individus qualifiés de dangereux. Plus tard, cédant à plusieurs groupes de pression, dont la majorité se trouvait en Colombie-Britannique, le gouvernement fédéral annonça, le 14 janvier 1942, une politique d'évacuation d'une partie des citoyens d'origine japonaise. Le 26 février, on appliqua le décret d'évacuation à toutes les personnes d'origine japonaise. Environ 22 000 individus quittèrent ainsi la "zone protégée" située le long de la côte de la Colombie-Britannique et furent relogés à l'intérieur des terres de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, principalement dans des camps de détention surveillés par la Commission de sécurité de la Colombie-Britannique.
Peu après l'évacuation, le gouvernement fédéral autorisa la vente et la location des fermes appartenant à des Canadiens d'origine japonaise au directeur de l'Office de l'établissement agricole des anciens combattants afin de les offrir aux anciens combattants de retour de la guerre. Agissant au nom du gouvernement fédéral, le Séquestre des biens ennemis confisqua par la suite tous les biens mobiliers et immobiliers que les exilés avaient laissés derrière eux. On lui en avait tout d'abord confié la garde pendant la durée de l'internement de leurs propriétaires mais, au début de 1943, le gouvernement du Canada autorisa le Séquestre à vendre tous ces biens, à l'exception de l'actif liquide, en tenant des encans ou en faisant des demandes de soumission.
Au cours des mois qui suivirent, on vendit ou se départit d'une autre façon des biens des Japonais sans en avoir demandé ou obtenu la permission des propriétaires. Dans plusieurs cas, des plaintes furent déposées à l'effet que les biens avaient été vendus à des prix inférieurs à leur juste valeur marchande. Les revenus de la vente, moins les retenues administratives, furent mis de côté à l'intention des anciens propriétaires mais, pour la plupart, les conséquences de cette vente s'avéraient catastrophiques.
Au Canada, la bataille menée par la population d'origine japonaise afin d'obtenir réparation se poursuivait depuis 1942. En janvier 1943, en apprenant la vente de leurs biens sans leur autorisation, plusieurs Japonais adressèrent des lettres de protestation au gouvernement. Trois propriétaires engagèrent des poursuites contre le Séquestre auprès de la Cour de l'Échiquier, s'objectant au pouvoir du gouvernement fédéral de disposer ainsi de leurs biens. Ils espéraient de plus que cette poursuite retarderait la vente de leurs biens. Cette affaire ne fut malheureusement entendue qu'en mai 1944, alors que la plupart des biens mobiliers et immobiliers étaient déjà vendus. De plus, la Cour de l'Échiquier ne rendit sa décision qu'en août 1947.
A la fin de la guerre, les Canadiens d'origine japonaise, insatisfaits des mesures de réparation du gouvernement, renouvelèrent leurs demandes. Par exemple, la Japanese-Canadian Committee for Democracy entreprit, à l'automne de 1946, un sondage auprès de 198 chefs de familles japonaises relogées à Toronto afin de déterminer l'étendue des pertes encourues. Les résultats démontrèrent que la valeur totale de leurs biens s'élevait à 1,6 million de dollars et que le gouvernement avait autorisé la vente de biens évalués à 1,3 million de dollars qui avait en fin de compte donné aux propriétaires un peu plus de 500 000 dollars.
Un an plus tard, soit en 1947, le Co-operative Commonwealth Federation Party confia au Comité des comptes publics de la Chambre des communes le mandat d'enquêter sur les agissements du Séquestre des biens ennemis. Ayant surtout enquêté au sujet de la vente des fermes au directeur de l'Office de l'établissement agricole des anciens combattants, le comité conclut que ces transactions comportaient des anomalies administratives en vertu desquelles il était souhaitable de mener une enquête plus approfondie. Finalement, le 17 juin, le comité recommanda la constitution d'une commission royale d'enquête sur les pertes présumément subies par des Canadiens d'origine japonaise lors de la vente de leurs biens à un prix inférieur à leur juste valeur marchande.
On annonca la constitution de la commission royale le 18 juillet 1947, mais les Canadiens d'origine japonaise se dirent tout à fait insatisfaits de son mandat. On y prévoyait le versement d'indemnité aux seules personnes en mesure de prouver juridiquement qu'elles avaient été victimes de négligence ou d'insouciance de la part du Séquestre ou de son personnel quant à la surveillance ou à la vente de leurs biens. En fait, ce mandat était plus restreint que celui que le Comité des comptes publics avait recommandé. A la suite de pressions de la part de plusieurs groupes intéressés, le gouvernement du Canada élargit le mandat de la commission de façon à ce qu'il reflète les recommandations antérieures du Comité des comptes publics. Ces nouvelles mesures étaient loin d'être parfaites mais permettaient tout de même à la plupart des propriétaires d'obtenir réparation. (Voir K. Adachi, The Enemy That Never Was: A History of the Japanese Canadians, McClelland and Stewart, Toronto, 1976, p. 319-327; et A.G. Sunahara, The Politics of Racism: The Uprooting of Japanese Canadians during the Second World War, James Lorimer and Co., Toronto, 1981, p. 151-155.)
Le 22 septembre 1988, après d'interminables négociations, le gouvernement du Canada et l'Association nationale des Canadiens d'origine japonaise sont parvenus à un accord. Globalement, le gouvernement s'est engagé à verser une indemnité de 21 000 $ à chaque Canadien d'origine japonaise toujours vivant et ayant été incarcéré au Canada pendant la Deuxième Guerre mondiale. De plus, le premier ministre Mulroney a présenté à la Chambre des communes des excuses en bonne et due forme au nom du gouvernement du Canada.
Les audiences de la commission se sont déroulées à Lytton, New Denver, Kamloops, Vernon, Grand Forks, Nelson et Vancouver, en Colombie-Britannique, et à Lethbridge, Moose Jaw, Winnipeg, Fort William, Toronto et Montréal du 3 décembre 1947 au 3 mars 1950. Un total de 1 434 personnes ont porté plainte. Collection de l'inventaire général de RG33-69.