Canada. Conseil d'appel des cours martiales : Le mécontentement à l'endroit du système de justice militaire, attribuable en grande partie à l'afflux d'un grand nombre de civils dans les forces armées durant la Seconde Guerre mondiale, est ce qui a incité le Canada, le Royaume-Uni et les États-Unis à procéder, après la guerre, à un examen du droit militaire et à prendre des mesures pour permettre aux militaires d'interjeter appel devant un tribunal civil. Au Canada, des modifications apportées à la Loi sur la défense nationale en 1950 ont mené à la création du Conseil d'appel des cours martiales, dans le but d'entendre les appels interjetés par des militaires contre la légalité des conclusions d'une cour martiale, la sévérité d'une peine ou la légalité de l'ensemble ou d'une partie de la peine. Ce Conseil offrait, pour la première fois dans le système de droit militaire, une procédure d'appel devant un tribunal extérieur, à peu près analogue à un tribunal civil. Le Conseil devait être présidé par un des juges de la Cour de l'Échiquier du Canada (l'ancêtre de la Cour fédérale et de la Cour d'appel fédérale) ou par un juge d'une autre cour supérieure. L'honorable John C.A. Cameron (1891-1976), juge à la Cour de l'Échiquier depuis 1946, a été nommé président du Conseil en 1950, et il en est demeuré président pour la durée de l'existence du Conseil. Le Conseil ne pouvait siéger qu'à Ottawa, en Ontario, en vertu d'une autorisation du ministre de la Défense nationale. Les audiences se déroulaient dans l'édifice de la Cour suprême et de la Cour de l'Échiquier. La première réunion, tenue le 12 février 1951, était une séance d'organisation. La deuxième réunion, qui était considérée comme une audience d'appel, s'est déroulée le 20 juin 1951.
Les membres qui composaient le Conseil devaient être juges d'une cour supérieure ou avocats actifs ou à la retraite. Les avocats qui y étaient nommés portaient généralement le titre de conseil de la reine. Les premiers membres du Conseil étaient Louis de la Chesnaye Audette, c.r., Bernard M. Alexandor, c.r., Duncan Kenneth MacTavish, c.r., Léonce Plante, c.r. et le juge John C.A. Cameron. Le 30 octobre 1952, d'autres membres ont été nommés au Conseil par le gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre de la Défense nationale : l'honorable juge Alan Gordon McDougall, Leonard W. Bricklington, c.r., le brigadier Melville B. Gordon et George Addy. Le fait de posséder de l'expérience antérieure en droit militaire était considéré par le ministère de la Défense nationale comme très utile pour le Conseil. Le président nommait trois membres ou plus pour entendre un appel. Lorsqu'il ne faisait pas partie du groupe, le président du Conseil devait nommer un des autres membres du comité à titre de président de l'audience. Avant l'audience, il pouvait remplacer les membres désignés par n'importe quel autre membre du Conseil, et il pouvait modifier le nombre de membres participant à l'audience pourvu, que le quorum de trois soit respecté.
Le greffier du Conseil recevait du juge-avocat général la déclaration d'appel de l'appelant, le procès-verbal des délibérations de la Cour martiale, tous les documents et dossiers pertinents à l'appel qui avaient été soumis à la Cour martiale, et tous les dossiers et pièces demandés par le président du Conseil ou le président de l'audience. Chaque membre du Conseil désigné pour l'audience recevait du greffier une copie de la déclaration de l'appelant ainsi que le procès-verbal des délibérations de la Cour martiale. Le greffier devait assister aux audiences et avoir en main l'ensemble des pièces et dossiers pertinents et il devait tenir un dossier complet de toutes les procédures devant le Conseil. George Arthur Audette, greffier de la Cour suprême du Canada, fut le premier greffier du Conseil d'appel des cours martiales. Nommé le 1er juin 1951, il est demeuré en poste jusqu'à sa démission, le 21 février 1959. Adrien E. Richard, greffier adjoint de la Cour de l'Échiquier du Canada, lui succéda à titre de greffier par intérim le 21 février 1959.
Dans une cause en appel, la Couronne était représentée soit par un officier commissionné nommé par le chef d'état-major approprié, soit par un avocat nommé par le ministère de la Justice, avec le consentement du ministère de la Défense nationale. L'appelant pouvait être représenté par l'avocat de son choix et pouvait interjeter appel en son nom propre. L'appelant pouvait assister ou comparaître à l'audience avec la permission du président du Conseil ou du président d'audience. Toutefois, si la peine de mort avait été imposée par la cour martiale, l'appelant avait le droit d'assister à l'audience de la cause en appel. Généralement, une audience durait une journée, mais dans les causes plus importantes, elle pouvait être prolongée une deuxième journée. Il était courant d'entendre deux ou trois causes consécutivement pour éviter aux membres désignés du Conseil d'avoir à se déplacer pour une seule cause. Selon le juge Cameron, le Conseil n'a pas siégé à plus de sept à dix reprises au cours d'une année.
Le Conseil suivait les Règles de procédure d'appel du Conseil d'appel des cours martiales établies en vertu de dispositions de la Loi sur la défense nationale adoptées par décret le 11 avril 1951, et modifiées subséquemment. Ces règles furent révoquées ultérieurement et remplacées par les Règles de procédure d'appel du Conseil d'appel des cours martiales formulées par le président du Conseil et approuvées par le Conseil privé le 8 décembre 1954. Le Conseil n'avait pas pour fonction de juger à nouveau les causes en appels ni d'examiner si les conclusions de la Cour martiale auraient pu être différentes. Le Conseil ne s'intéressait qu'à la légalité des conclusions de la Cour martiale, et à la mesure dans laquelle les pièces à l'appui étaient suffisantes pour justifier ces conclusions. Il renversait une condamnation uniquement s'il était manifeste qu'un doute raisonnable eu égard à la preuve présentée au tribunal militaire existait et que la personne accusée n'avait pas eu droit au bénéfice de ce doute. Le Conseil ne remettait pas en question la crédibilité des personnes témoignant devant le tribunal, et aucun nouvel élément de preuve ne pouvait être présenté à l'audience sans le consentement du président du Conseil ou du président d'audience. Les lois de la preuve applicables dans les cours martiales s'appliquaient également aux procédures d'appel devant le Conseil. Toutefois, l'appelant ou son avocat pouvait modifier ou proroger sa déclaration d'appel initiale. L'appelant pouvait en tout temps abandonner son appel en donnant un avis écrit à cet effet. Si la déclaration d'appel n'était pas fondée sur des motifs suffisants d'appel, à savoir des erreurs de droit liées au manque d'éléments de preuve, ou à une interprétation erronée de la preuve ou des erreurs de droit du juge-avocat dans ses instructions à la cour martiale, l'appel était rejeté. Généralement, aucun motif d'appel ne pouvait être entendu outre les motifs contenus dans la déclaration d'appel initiale ou dans ses modifications. La personne accusée avait également le droit d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada sur des questions de droit, sur autorisation, en cas d'unanimité des membres du Conseil et, de plein droit, en cas de dissidence d'un d'entre eux. Le ministre de la Défense nationale (qui représentait Sa Majesté devant les cours martiales) ne disposait pour sa part d'aucun droit d'appel des décisions du Conseil.
En 1959, la Parlement a remplacé le Conseil d'appel des cours martiales par la Cour d'appel de la cour martiale, une cour supérieure d'archives dirigée par un président et composée uniquement de juges de cours supérieures désignés par le gouverneur en conseil, et provenant de la Cour de l'Échiquier du Canada ou des cours supérieures des provinces. Le juge Cameron en est devenu le premier président, une fonction qu'il a occupée jusqu'au moment de sa retraite comme juge à la Cour de l'Échiquier en janvier 1964, ce qui mettait automatiquement fin à son mandat à la Cour d'appel de la cour martiale.