Dominion Textile Company : La Dominion Textile Company Limited est fondée le 4 janvier 1905. Elle est créée par la fusion de quatre entreprises indépendantes du domaine du textile : Dominion Cotton Mills Company Limited, Merchants Cotton Company Limited, Colonial Printing & Bleaching Company Limited et Montmorency Cotton Mills Company Limited. Cette nouvelle entreprise, dont les bureaux se trouvent à Montréal, est financée par des hommes d'affaires bien connus, soit Herbert Holt, Vincent Meredith, l'honorable Robert Mckay, David Morrice et J. P. Black. David Yuile est le premier à exercer la présidence de la Dominion Textile, qui deviendra la plus importante usine de textile au Canada.
La création de la Dominion Textile en 1905 découle d'une série de fusions ayant commencé dans cette industrie dans les années 1880. Alexander F. Gault et David Morrice tentent en vain de contrôler l'industrie du textile au moyen de cartels de commercialisation, puis par l'acquisition et la fusion de petites entreprises. Leurs actions ont des répercussions directes sur la création de la Dominion Textile et de son orientation organisationnelle. Cependant, certains actionnaires de Dominion Cotton Mills Co. et de Merchants Cotton Co. résistent à la fusion qui mène à la création de l'entreprise. En 1917, le Conseil privé rend une décision et tranche en faveur de la Dominion Textile et donne enfin à l'entreprise le plein contrôle de ses actifs.
Au moment de sa création, la Dominion Textile exploite onze usines qui produisent du coton brut et du tissu de coton fini pour le marché canadien. Le succès de l'entreprise repose sur existence de tarifs protecteurs gouvernementaux et la coordination des activités d'exploitation des usines. Ces deux processus s'enclenchent pour de bon en 1909 lorsque Charles Gordon devient président et nomme F. G. Daniels au poste de directeur général. Gordon joue un rôle important dans les activités de lobbyisme pour des tarifs protecteurs, alors que Daniels s'occupe de la réorganisation des activités de l'entreprise. Ce dernier apporte des améliorations aux grandes usines et ferme les petites usines moins rentables, dont celle de Windsor (Nouvelle-Écosse), en 1910, et celle de Moncton (Nouveau-Brunswick), en 1914.
Alors que la Dominion Textile consolide sa position sur le marché canadien, l'entreprise connaît une expansion. En 1906, le conseil d'administration de la Dominion Textile prend le contrôle de la Penman Manufacturing Company et la renomme Penmans Limited. Bien que ses activités demeurent distinctes de celles de l'entité mère jusque dans les années 1960, les cadres supérieurs de la Dominion Textile participent de près à la prise de toutes les décisions importantes liées à Penmans. En 1911, la Dominion Textile prend également en charge la gestion de la Montreal Cotton Company, en lançant un processus d'acquisition qui durera jusqu'en 1948.
En 1922, la Dominion Textile Company Ltd. vend ses actifs à une toute nouvelle entreprise, soit la Dominion Textile Limited (qui sera plus tard renommée la Dominion Textile Incorporated). La réorganisation financière permet de financer de nouvelles orientations organisationnelles, dont des essais relatifs aux fibres de rayonne et à la production de câbles pour pneus. En 1928, peu après la nomination de F. G. Daniels à la présidence, la Dominion Textile acquiert deux usines de câbles pour pneus et crée de nouvelles filiales, soit la Sherbrooke Cotton Company et la Drummondville Cotton Company.
Au cours de la Dépression, les profits et la production de l'entreprise demeurent stables. En 1933, lorsque sir Charles Gordon accède à la présidence pour une deuxième fois, la Dominion Textile contrôle 38 % du marché canadien du coton. Après l'ajout des ventes de sa société apparentée, Montreal Cottons, la Dominion Textile contrôle en fait 48 % du marché. Malgré cette position aussi solide, les tarifs protecteurs demeurent un enjeu important, comme le prouve la fermeture soudaine de l'usine de rayonne de Sherbrooke, en 1936. La Dominion Textile met à pied plus de 1000 personnes afin de protester contre les importations japonaises sans restriction. L'incident mène à la Commission royale sur l'industrie du textile de 1937, qui critique sévèrement l'entreprise pour sa dépendance aux tarifs. Cette fermeture entraîne également une détérioration des relations de travail, lesquelles demeureront tendues jusque dans les années 1970 et mèneront à plusieurs longues grèves, y compris celle de 1946 dans les usines de Valleyfield.
En 1939, G. Blair Gordon, le fils de sir Charles, devient le nouveau président de la Dominion Textile. Il dirige l'entreprise au cours de la période de production intense de la Deuxième Guerre mondiale. À cette époque, 70 % de la production est directement envoyée aux opérations militaires et aux autres services essentiels en temps de guerre. La fabrication de textile devient l'industrie la plus importante au Québec en ce qui a trait à l'emploi, aux salaires et à la valeur des produits.
Après la guerre, les activités de la Dominion Textile changent pour suivre les tendances de l'industrie et de la société. Sous la direction du directeur général F. R. Daniels (qui deviendra président en 1961), l'entreprise lance un programme ambitieux de modernisation dans les années 1950 en vue de remplacer l'équipement usé du temps de guerre par la nouvelle technologie. D'anciennes usines sont fermées, dont celle d'Hochelaga. D'autres usines, plus grosses, sont modernisées, p. ex. à Montréal, à Sherbrooke et à Valleyfield. Une nouvelle administration centrale est construite à Montréal pour symboliser le succès de la Dominion Textile en temps de guerre et pour se préparer à la future croissance de l'entreprise.
Dans les années 1960, la philosophie de l'entreprise se met à évoluer afin d'essayer de suivre les tendances liées aux achats des consommateurs. Sous la direction d'E. F. King, la structure de gestion de l'entreprise est subdivisée et décentralisée. Le marketing devient très important et dicte les exigences en matière de production. L'entreprise accroît sa production de fibres synthétiques, ouvrant de nouvelles usines à Richelieu (Québec) et à Long Sault (Ontario), en vue de rester concurrentielle dans l'industrie. Cette tendance à la diversification continuera de définir la croissance de l'entreprise pendant les deux décennies qui suivront.
Lorsqu'E. F. King accède à la présidence de la Dominion Textile en 1966, une nouvelle tendance s'établit : les nouveaux présidents proviendront de la Division du marketing. En effet, les deux prochains présidents de la Dominion Textile sont R. H. Perowne (1969) et T. R. Bell (1974), tous deux vice-présidents du marketing. Ces trois hommes mènent à bien le programme de diversification de la Dominion Textile par l'acquisition de compétiteurs et la création de nouvelles filiales. Sous leur direction, la Dominion Textile suit de nombreuses tendances de l'industrie en investissant dans le tricot double, les tapis, les sous-couches de tapis, les textiles non tissés, les géotextiles, le denim et les tissus de renfort. L'acquisition la plus importante est sans doute celle de DHJ Industries, en 1975. En utilisant le réseau international de ventes et de distribution de DHJ, la Dominion Textile passe d'une entreprise importante sur le marché canadien à une multinationale entretenant des relations un peu partout dans le monde.
Dans les années 1980, la Dominion Textile réorganise ses activités canadiennes afin de fonctionner en tandem avec les holdings internationaux et de se préparer à la concurrence plus féroce qui fera son apparition avec le libre-échange. Les installations canadiennes sont regroupées en quatre divisions distinctes : secteur industriel, vêtements, produits de consommation et vente de laine. Leurs chaînes de production sont fusionnées, menant à la fermeture de plusieurs usines. La concurrence accrue à l'échelle mondiale, quant à elle, frappe durement les usines canadiennes. Au début des années 1990, C. H. Hantho (président, 1989) entame la restructuration du géant du textile. D'autres usines canadiennes ferment, et l'entreprise vend bon nombre de ses actifs. En 1997, deux ans après le début de la présidence de J. A. Boland, des investisseurs américains achètent la Dominion Textile.